Rachat de SFR : vers un duel entre Xavier Niel et Bouygues qui profiterait à Patrick Drahi ?

La restructuration financière d’Altice France ne sera finalisée qu’en septembre, mais déjà, les préparatifs pour une vente de SFR battent leur plein. En coulisses, les grands opérateurs français affûtent leurs armes.
Les opérateurs s’activent autour d’une éventuelle vente de SFR, avec Free et Bouygues Telecom en tête de file, selon La Lettre de l’Expansion. Patrick Drahi semble en effet prêt à se séparer de son opérateur après avoir entamé son retrait progressif des télécoms. S’il détient encore 55 % d’Altice France à l’issue d’un accord de restructuration de la dette, l’entrepreneur pourrait tirer jusqu’à 5 milliards d’euros de cette cession, à condition que les enchères s’envolent. Et rien de tel qu’une opposition frontale entre Martin Bouygues et Xavier Niel pour y parvenir.
Les deux groupes partagent une ambition : renforcer leur position dans un marché très concurrentiel. Pour Bouygues Telecom, l’absorption de SFR permettrait d’atteindre une taille critique et de concurrencer plus frontalement Orange. Pour Iliad, présent dans plusieurs pays européens, ce serait l’occasion de consolider sa base française et de créer un groupe aux dimensions continentales. Le choc des ambitions pourrait néanmoins buter face à la réglementation. En cas de rachat par Bouygues, ce serait l’Autorité de la concurrence française qui se saisirait du dossier. Si c’est Iliad qui l’emporte, l’affaire passerait par Bruxelles, compte tenu de sa présence dans plusieurs pays européens.
Patrick Drahi peut s’estimer chanceux. L’opposition entre deux poids lourds français du secteur lui donne une marge pour maximiser la valeur de SFR, malgré un contexte commercial dégradé pour l’opérateur. En 2024, SFR a vu reculer ses revenus et son nombre d’abonnés, même s’il a présenté un début d’année plus positif. La rivalité Bouygues–Niel serait donc un levier précieux. Derrière ces deux favoris, Orange, ainsi que des acteurs étrangers comme Etisalat (Émirats arabes unis) et STC (Arabie saoudite), surveillent la situation. Des fonds d’investissement comme KKR, GIP ou Ardian sont aussi dans la course, bien que leur intérêt repose davantage sur la rentabilité que sur une logique industrielle.
Les équipes s’activent : Bouygues est conseillé par Rothschild et les avocats Darrois & Savoie, tandis qu’Orange a mandaté Evercore pour suivre le dossier. Du côté d’Iliad, Xavier Niel n’a pas encore officialisé son banquier, mais pourrait s’appuyer sur Stéphane Richard, ancien patron d’Orange devenu banquier chez Perella Weinberg Partners. La confrontation entre Bouygues et Niel pourrait être le point de bascule d’une recomposition majeure du marché télécoms français, si la vente de SFR venait à se concrétiser. Une chose est sûre : sur la ligne de départ, chacun prépare ses arguments — mais il faudra encore franchir les nombreux obstacles réglementaires avant d’atteindre le cœur du réseau, d’autant qu’une vente à la découpe serait aussi envisagée.