Ecoutes téléphoniques, enquêtes judiciaires : l’État veut que faire appel à Orange, Free, SFR et Bouygues coûte moins cher
L’État veut réduire la facture des écoutes et réquisitions téléphoniques.
Le ministère de la Justice cherche à faire des économies sur les frais liés aux enquêtes judiciaires. En ligne de mire : les coûts facturés par les opérateurs téléphoniques lorsqu’ils fournissent des données aux autorités. Des négociations sont en cours avec Orange, Free, Bouygues Telecom et SFR, avec à la clé plus de 10 millions d’euros d’économies possibles.
En dix ans, le coût moyen d’une enquête judiciaire a doublé. Une inflation qui s’explique, entre autres, par la multiplication des demandes adressées aux opérateurs téléphoniques : localisation d’un téléphone, accès aux relevés d’appels, ou encore interception de communications. Ces démarches, appelées « réquisitions judiciaires », sont utilisées par les magistrats et les forces de l’ordre dans le cadre d’enquêtes pénales.
Or, chaque réquisition est facturée par les opérateurs à l’État, et la note devient salée. En 2024, ces dépenses ont représenté près de 29 millions d’euros pour la Chancellerie. Avec la hausse attendue du nombre de demandes en 2025, le ministère espère obtenir un rabais de plus de 10 millions d’euros en renégociant les tarifs. Toutes ces réquisitions passent par la Plateforme nationale des interceptions judiciaires (Pnij). Cet outil, géré par l’Agence nationale des techniques d’enquêtes numériques judiciaires (Antenj), permet de centraliser et sécuriser les interceptions, qu’il s’agisse d’écoutes téléphoniques, de messages ou de données de géolocalisation. Ainsi, lorsque les enquêteurs ou magistrats veulent obtenir des informations auprès d’un opérateur, ils doivent le faire via la Pnij. Celle-ci enregistre la demande, la transmet à l’entreprise concernée, puis reçoit et stocke les données. Ce système vise à mieux encadrer les pratiques et à éviter les contournements ou demandes faites en dehors du cadre légal.
Un rapport parlementaire et une mission d’inspection convergent
À l’heure où l’État cherche à réduire ses dépenses, ces frais sont dans le collimateur du Parlement. Un rapport du sénateur Antoine Lefèvre (Les Républicains), publié en octobre, propose plusieurs pistes pour alléger la facture des frais de justice, dont une refonte complète du tarif des réquisitions. Une mission conjointe de l’Inspection générale des finances (IGF) et de l’Inspection générale de la justice (IGJ), rendue publique en mai 2025, va dans le même sens. Elle recommande de baisser le coût unitaire des réquisitions et de créer des tarifs pour certaines prestations aujourd’hui non facturées de manière encadrée. Les négociations avec les opérateurs devraient se poursuivre dans les prochains mois. Si elles aboutissent, la justice pourrait alléger sa facture sans réduire ses capacités d’enquête.
Source : La Lettre