Vente de SFR : les créanciers comptent sur Patrick Drahi pour faire payer plus cher Orange, Free et Bouygues Telecom
Les créanciers d’Altice France restent pour l’instant alignés avec Patrick Drahi dans le dossier SFR, malgré les pressions d’Orange, Bouygues et Free, qui espéraient un revirement en leur faveur.
Les trois opérateurs français, qui ont maintenu leur offre de rachat à 17 milliards d’euros pour SFR, comptaient sur un sursaut des créanciers, désormais actionnaires à hauteur de 45 % du capital d’Altice France, pour faire fléchir l’homme d’affaires. Un pari risqué : d’après des sources proches du dossier citées par Les Échos, ces investisseurs misent encore sur Patrick Drahi pour obtenir le meilleur prix.
« La proposition faite par les trois opérateurs est d’une juste valeur, et il n’y a pas d’autres acquéreurs à l’heure actuelle sur le marché », avance une source du côté des acheteurs. « L’offre permettrait non seulement de rembourser la dette, mais aussi de créer une plus-value substantielle pour les créanciers. » Malgré cet argumentaire, les détenteurs de dette ne semblent pas disposés à forcer la vente. Toujours selon Les Échos, la première proposition du trio Orange–Bouygues–Free avait été « bien reçue » par les prêteurs seniors, qui détiennent environ 31 % du capital d’Altice France, via des fonds d’investissement comme BlackRock, Pimco ou Fidelity.
Les discussions ont néanmoins fait grimper la valeur du certificat de SFR, échangé entre ces créanciers-actionnaires, de plus de 10 % après l’annonce de l’offre. « Cela montre que les prêteurs réagissent de manière positive », résume un observateur cité par le quotidien économique. Si les investisseurs gardent leur calme, c’est parce que l’accord de restructuration signé début octobre avec Patrick Drahi leur accorde plusieurs protections : deux sièges d’administrateurs indépendants au conseil d’administration d’Altice France, ainsi qu’un droit de veto sur les cessions supérieures à 3 milliards d’euros.
« Cela ne veut pas dire qu’ils peuvent forcer Patrick Drahi à vendre, mais qu’ils peuvent s’y opposer si la valorisation n’est pas jugée à la hauteur », explique une source proche du dossier citée par le quotidien. Au-dessus d’un seuil de 23,6 milliards d’euros de valorisation, ce droit de veto disparaîtrait, laissant à Patrick Drahi les pleins pouvoirs. L’offre actuelle des trois opérateurs valorise Altice France à 21 milliards d’euros, soit sous ce seuil.
Seul un scénario extrême pourrait forcer la main au fondateur d’Altice : l’activation d’une action de préférence (“golden share”), qui transférerait temporairement le contrôle d’Altice France aux créanciers en cas de défaut de paiement ou de décision jugée défavorable. Ce mécanisme reste toutefois hypothétique. Après la réduction de sa dette de 24,1 à 15,6 milliards d’euros, le groupe affirme pouvoir honorer sans difficulté sa première échéance de remboursement, fixée à 920 millions d’euros en 2028. « Si la consolidation ne se concrétise pas d’ici là, alors il est fort à parier que des cessions par appartements auront lieu », anticipe une source proche des négociations, citée par Les Échos. Pour l’heure, les discussions autour de SFR ressemblent donc à une longue partie de poker, où les créanciers misent encore sur Patrick Drahi pour maximiser la valeur de leurs actifs, quitte à faire patienter les acheteurs.