Pour SFR, “l’arrivée de Free Mobile a retardé le développement des réseaux en France”, vrai ou faux ?
S’il compte investir 3,5 milliards d’euros dans les infrastructures en 2019, SFR regrette que la France ait pris du retard sur certains pays en matière de déploiement comme au Portugal. L’arrivée de Free Mobile en 2012 en est selon lui la cause mais les chiffres parlent d’eux-mêmes.
"Nous avons, en France, les tarifs télécoms les plus bas d’Europe, mais on a du retard par rapport à d’autres pays. Le Portugal aura fini d’être fibré dès cette année. L’arrivée de Free a retardé le développement des infrastructures en France parce que les opérateurs avaient moins de moyens pour investir", a lancé Alain Weill PDG d’Altice Europe hier dans un entretien accordé à Ouest-France. Alors vrai ou faux ?
En remontant un peu dans le temps, le régulateur a démontré le contraire au travers de son observatoire de l’évolution des investissements dans le secteur des télécoms en 2012, avec 7,3 milliards d’euros investis contre 7,2 milliards l’année précédente. Pourtant les opérateurs n’en démordaient pas, percevant l’arrivée de Free Mobile comme une catastrophe pour la capacité d’investir. En 2013, malgré les difficultés annoncées par les rivaux de Free, l’investissement s’est maintenu à un niveau élevé chez les telcos bien qu’en baisse de 200 millions d’euros sur l’année, restant toutefois supérieur à la période 2007-2009, précédent l’arrivée de Free Mobile. En 2014, le montant de l’effort (6,9 milliards d’euros) accusait un léger retrait mais demeurait supérieur à la moyenne des dix dernières années. Sébastien Soriano, président de l’ARCEP, avait alors estimé que "ce n’est pas un repli, mais plutôt une pause." Pour lui, cette tendance s’expliquait par "la consolidation dans le secteur des télécoms", laquelle aurait provoqué "un trou d’air". L’arrivée de Free Mobile sur le marché du mobile deux ans plus tôt ne semblait donc aucunement liée.
Pointe alors l’année 2015. Si les investissements ont repris de plus belle avec un nouveau record historique à 7,8 milliards d’euros, soit une progression supérieure à 10% en un an hors achat de fréquences, SFR a quant a lui été largement décrié sur ses investissements. Depuis son rachat par Patrick Drahi, la stratégie affichée, se résumait à une baisse drastique des coûts. Celle-ci a rapidement atteint ses limites en engendrant une sévère fuite d’abonnés. En octobre de la même année, face aux mauvais recrutements, Numéricable-SFR a même accusé Vivendi d’avoir sous-investit dans les réseaux. Michel Combes alors nouveau patron de l’opérateur, a rejeté la responsabilité de cette fuite sur l’ancien propriétaire : « Nous souffrons toujours du manque d’investissement dans le réseau de SFR avant qu’Altice n’en devienne le propriétaire. SFR a aussi désinvesti sur la 4G. On essaye de rattraper ce retard. Dans les prochains trimestres, quand la qualité du réseau se sera améliorée, nous renouerons avec la croissance ».