Malgré la demande de l’État, Orange, Free, SFR et Bouygues n’ont pas à bloquer Shein, la justice a tranché
La mesure de blocage réclamée par l’État n’a pas été validée par le tribunal.
C’est une décision défavorable pour le gouvernement. Le tribunal judiciaire de Paris a statué en faveur du maintien en ligne du site Shein. Seule la vente de produits sexuels demeure suspendue, le temps de la « mise en place de mesures de vérification d’âge, autres qu’une simple déclaration de majorité, permettant de rendre ces contenus inaccessibles aux personnes mineures », selon le jugement rendu public vendredi.
Pour mémoire, l’État avait engagé une action contre la plateforme chinoise à la fin du mois d’octobre, invoquant un trouble à l’ordre public lié à la commercialisation, par des vendeurs tiers, de poupées pédopornographiques et d’armes sur la place de marché du site. Les autorités réclamaient alors une suspension de trois mois.
Une mesure jugée disproportionnée
Le tribunal a bien reconnu l’existence d’un « dommage grave à l’ordre public », tout en considérant que les ventes incriminées étaient « ponctuelles ». Il a également relevé que la plateforme avait procédé au retrait des produits concernés. Dès le 26 novembre, le procureur avait indiqué qu’il ne soutiendrait pas la demande de blocage formulée par l’État. Lors de l’audience du 5 décembre, cette mesure avait été jugée disproportionnée par le parquet.
Anticipant cette issue, l’État espérait néanmoins obtenir une prolongation de la suspension de l’ensemble de la marketplace de Shein, c’est-à-dire de tous les produits proposés par des marchands tiers. Les contenus pour adultes, temporairement bloqués par décision judiciaire, représentent pour leur part moins de 0,01 % des ventes de la plateforme.
Shein a réagi rapidement à cette décision. « Nous saluons cette décision. Nous sommes engagés à poursuivre l’amélioration continue de nos processus de contrôle, en étroite collaboration avec les autorités françaises, et nous avons intensifié ces initiatives avec l’ambition d’établir des standards parmi les plus exigeants de l’industrie. Notre priorité reste la protection des consommateurs français dans le respect du cadre légal et réglementaire applicable », a déclaré son porte-parole, Quentin Ruffat.
La plateforme avait multiplié les signes de bonne volonté. Le site d’ultra-fast fashion avait notamment fermé de manière préventive sa place de marché le 5 novembre, une décision non négligeable pour son modèle économique. Lancée en 2024, cette marketplace, à l’image de celles proposées par Amazon, Darty ou Leroy Merlin, demeure encore marginale dans le chiffre d’affaires du groupe. Elle constitue toutefois un puissant levier d’attractivité pour soutenir son activité principale, centrée sur le vêtement.
Basé à Singapour, le site bénéficie d’un fort référencement sur Google pour les produits vendus sur sa marketplace, notamment dans les catégories maison, décoration et bricolage. En octobre, Shein a ainsi attiré 21,2 millions de visiteurs uniques, contre 15,7 millions un an plus tôt, soit une progression de 35 % sur un an. L’activité du site va donc pouvoir reprendre progressivement.
Pour autant, les procédures judiciaires ne sont pas closes. Une enquête pénale a été ouverte par le parquet de Paris et confiée à l’Office des mineurs, qui mène également des investigations sur AliExpress, Temu, Wish et eBay. Par ailleurs, mi-novembre, l’ensemble des syndicats professionnels du commerce, y compris celui des supermarchés, ont déposé une plainte pour concurrence déloyale devant le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence.
Source : Les Echos