Streaming illégal : une faille dont personne ne parle peut coûter très cher à Netflix, Prime Video, Disney+ etc
Le CDN leeching, qui passe sous les radars du grand public, représente une menace très insidieuse pour les géants de la SVOD en détournant leurs ressources pour du streaming illégal.
Quand les pirates parasitent les plateformes légales à un tout autre niveau. Le « CDN leeching », technique qui détourne directement les réseaux de distribution des plateformes, permet à des services pirates de diffuser des flux en haute qualité aux frais des géants du secteur. Pendant que les plateformes combattent le partage de comptes et le téléchargement illégal visibles, cette fuite invisible grève leurs coûts et leurs revenus.
Quand les pirates utilisent les mêmes serveurs que les plateformes
Les Content Delivery Networks, ou CDN répartissent les vidéos sur des serveurs proches des utilisateurs pour assurer une lecture fluide. Le CDN leeching exploite des failles techniques de cette infrastructure grâce à des clés d’accès ou tokens volés ou des vulnérabilités techniques. Le résultat reste le même : des pirates obtiennent des flux officiels et les redistribuent sur des sites ou applis illégales, avec une qualité identique à l’original.
Des acteurs de la cybersécurité alertent depuis des années. Velocix, Irdeto et d’autres estiment que jusqu’à 30 % du trafic CDN de certaines plateformes pourrait être consommé par des utilisateurs non autorisés. Traduit en argent, le cabinet Parks Associates évoque un manque à gagner global qui pourrait dépasser les 100 milliards de dollars d’ici 2027. Pour les plateformes, la facture porte sur la bande passante, l’hébergement et la gestion des flux, tandis que les pirates ne paient rien de tout cela.
Ainsi, pour Netflix et consorts, la menace est triple : perdre des abonnés puisqu’ils se tournent vers la solution illégale, voir leurs propres ressources exploitées gratuitement par des pirates mais aussi un possible impact sur la qualité de service, étant donné que les ressources allouées vers les abonnés sont détournées par les escrocs.
Une pratique très difficile à détecter
À la différence des sites pirates classiques, ces flux émanent des serveurs légitimes : la qualité est bonne, la latence faible, l’expérience utilisateur est convaincante. Les systèmes de détection classiques, axés sur les sites et les URLs illégales, peinent à repérer que le trafic servi profite en réalité à des tiers malveillants. De plus, la nature distribuée des CDN complique les enquêtes, en particulier quand des jetons ou configurations compromises proviennent d’intermédiaires ou de fournisseurs tiers.
Le phénomène a fait naître une offre commerciale : Piracy-as-a-Service. Pour quelques dizaines de milliers de dollars, un pirate peut acheter un kit complet avec interface soignée, un système de paiement et même la gestion d’abonnements pour lancer une plateforme qui ressemble en tout point à un service légal. Selon des analyses industrielles, certaines de ces opérations affichent des marges très élevées, parfois proches de 90 %, parce que la bande passante est fournie par les CDN des victimes.
La riposte existe, mais elle est coûteuse et technique. Parmi les mesures possibles : durcir la gestion des tokens et des clés d’accès, renforcer la surveillance comportementale du trafic pour repérer les usages anormaux ou encore appliquer des politiques d’authentification plus strictes côté CDN. Sans oublier la collaboration avec les fournisseurs de CDN et les acteurs de cybersécurité ou poursuivre les opérateurs de Piracy-as-a-Service. Ces corrections demandent des investissements et une coopération internationale, car les pirates opèrent souvent depuis des juridictions étrangères. En bref, le CDN Leeching représente un énorme défi pour les plateformes, d’autant qu’il est de plus en plus facile à exploiter.
Source : Torrentfreak