“PQ+” : une tribune déclare la guerre à Orange, Free, SFR et Bouygues, accusés de ne rien changer sur la fibre

“PQ+” : une tribune déclare la guerre à Orange, Free, SFR et Bouygues, accusés de ne rien changer sur la fibre

L’association des collectivités engagées dans le numérique, l’AVICCA, tire à boulets rouges sur les opérateurs et leurs plans d’action pour mettre fin aux malfaçons sur la fibre. Aucune variation positive n’a été constatée sur la qualité de leurs interventions. 

L’AVICCA en a ras-le-bol de l’immobilisme des opérateurs sur les malfaçons rencontrées sur les réseaux fibre impactant les Français depuis de nombreuses années. Dans une tribune plutôt acerbe, l’association des collectivités engagées dans le numérique dit ses quatre vérités aux opérateurs face à un constat toujours aussi alarmant également dressé par l’Arcep : les témoignages de clients débranchés sauvagement, d’abonnés privés d’internet régulièrement ou très longtemps sont encore beaucoup trop nombreux.

L’Avicca qui n’a jamais vraiment été en osmose avec Orange, Free, SFR et Bouygues, est aujourd’hui formelle : “Côté raccordements, rien n’a changé en un an. Les dégradations sur les réseaux mêmes neufs continuent. Aucun infléchissement n’est visible. Les conflits locaux avec les prestataires des opérateurs se multiplient. Et si les opérateurs commerciaux  continuent d’affirmer haut et fort que les problèmes ne concernent que 0,15% (ou “moins de 3%” ou encore “quelques %”, chaque OC voire chaque interlocuteur d’OC ayant son propre chiffrage), dans le monde réel, pas un habitant n’est passé au travers des problèmes ou ne connaît pas quelqu’un dans son entourage qui ait vécu (ou vit encore) une galère avec son raccordement à la fibre optique”.

“Des pseudo-solutions sensées mettre un terme à des pratiques qui restent inchangées”

Après la feuille de route qualité de la filière télécom en avril 2020,  puis le plan d’actions complémentaires pour l’amélioration de la qualité de l’exploitation de l’Arcep fin 2021, suivi du Plan Qualité d’InfraNum et de la FFT en septembre 2022, “voici venu le “nouveau nouveau nouveau” plan qualité de la Fédération française des télécoms, en 2023 : appellons-le PQ+”,  ironise dans sa tribune l’AVICCA.

Présentées récemment, les nouvelles mesures des opérateurs visant à résoudre les problèmes de malfaçons  et de vandalisme sur les réseaux fibre en réponse aux critiques de l’Etat et des collectivités locales, ne passent pas. C’est même la goutte d’eau qui fait déborder le vase de l’association présidée par le sénateur Patrick Chaize.

“Que dire de ces pseudo-solutions sensées mettre un terme à des pratiques qui restent inchangées ?  Cela fait 6 ans que cela dure et qu’on promet des lendemains meilleurs aux collectivités, aux élus et aux usagers… Au delà de l’habillage sémantique à coups de « fluidification, responsabilisation, transparence… », l’Avicca note avec une certaine perplexité la proposition phare de ce “PQ+”. Il s’agirait ainsi pour les opérateurs commerciaux de “s’autoévaluer”. Ces derniers souhaitent fournir de nouveaux indicateurs reflétant la perception client et portant sur leurs processus industriels tout en partageant en temps réel des informations sur les interventions pour fluidifier les processus.

“Question récurrente qui nous est posée : que pense l’Avicca de ce nouveau nouveau nouveau plan qualité ? Rien non plus ! Rien de plus que les “plans” passés. Et rien de moins que la prochaine trouvaille des opérateurs pour le cru 2024″, se désole la tribune avant de dresser elle-même le bilan du plan qualité de 2022 promis il y a un an et qui est aujourd’hui aux abonnés absents :

“Il n’y a rien à en dire de positif. Les reprises de réseaux ? Elles ont été faites, mais les réseaux sont aussitôt à nouveau dégradés. Les Compte-Rendus d’Intervention (CRI photo) ? Ils sont non seulement toujours incomplets, mais également faux dans des proportions dépassant l’entendement (horodatages et géolocalisations des photos trafiqués). Le module de signalement des coupures “accidentelles” ? L’ensemble des fonctionnalités attendues n’est toujours pas disponible. L’outil n’est que partiellement opérationnel et pas sur l’ensemble du territoire ni pour l’ensemble des tandems opérateurs d’infrastructure (OI) et commerciaux (OC). L’autolabellisation des prestataires des opérateurs ? Pompeusement appelée “certification”, ce “quality-washing” des pratiques de sous-traitance n’a rien changé sur le terrain. Il faut dire qu’il consiste à ce que le prestataire lui-même auto-coche un certain nombre de cases pour être “labellisé”, sans exigence de formation ni de vérification de l’utilisation d’équipements adaptés… Ce sont toujours les mêmes prestataires qui interviennent. Les centres de formation restent désespérément vides. Les accidents du travail restent monnaie courante. Les nouveaux contrats STOC ? Tous ne sont pas encore signés entre OI et OC.”

Au final, rien sur le terrain ne permet selon l’AVICCA de mesurer la moindre variation positive de la qualité de l’intervention d’Orange, Free, SFR et Bouygues Telecom.

“L’immobilisme, une force en marche”

La seule issue possible désormais pour l’association des collectivités, c’est le passage dans les délais les plus brefs de la proposition de loi émanant de son président sur la qualité des raccordements FttH devant l’Assemblée nationale. Selon elle, l’essentiel pour les opérateurs c’est de gagner du temps. “Et à cet exercice au moins, ils réussissent, d’années en années, à ne rien changer, tout en gesticulant toujours plus pour faire croire que tout change. Attention, leur recette pourrait ne plus prendre”.

Les opérateurs ne le cachent pas, il faut du temps pour voir les résultats de leurs plans d’action, mais sont-ils de mauvaise foi ? L’AVICCA dispose désormais d’un suivi qualité des raccordements FttH en mode STOC (sous-traitance) et en mode OI (opérateur d’infrastructure) sur une grande zone RIP départementale avec bientôt deux ans de recul. “Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ce contre-argument des opérateurs commerciaux vole lui en éclat”. La qualité des raccordements a baissé parfois près de 10% en mode STOC de 3 différents opérateurs commerciaux sur une année glissante. A contrario, la qualité des raccordements en mode OI, déjà élevée, s’est améliorée en atteignant parfois les 100% , “de quoi battre en brèche l’idée que la course à la qualité est une course au long cours”. Autrement dit, certains acteurs n’ont pas attendu les plans d’action pour commencer à faire de la qualité. “Il se trouve que dans certains points du territoire, depuis l’origine des raccordements, le mode STOC – sans CRI ni autolabellisation ni e-intervention ni autre poudre de perlinpimpin – ne pose que peu de problèmes.”

Pour l’AVICCA, une raison supplémentaire pousse naturellement les opérateurs commerciaux “à ne surtout rien changer” en prenant exemple sur un RIP. “Sur une année, le contrôle de la qualité des raccordements et de l’état des armoires lui coûte, factures à l’appui, 750 000 €. Et si les opérateurs responsables de ces dégradations sont bien identifiés, l’opérateur d’infrastructure signale n’avoir récupéré que 70 000 € de pénalités à date ! Encore une excellente affaire pour les opérateurs commerciaux concernés”. Alors que faire quand rien ne va ?

Source : AVICCA

Cet article a été repris sur le site Univers FreeBox