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Accès aux réseaux FTTH publics : pourquoi ça coince avec Free et les autres principaux FAI ?
Suite à notre article concernant ces zones déjà éligibles à la fibre optique mais non-accessibles aux 5 grands opérateurs, Free, SFR, Bouygues, Orange et Numericable. Sur de nombreux Réseaux d’Initiative Publique, seuls quelques opérateurs presque inconnus du grand public comme Wibox, Kiwi Fibre Optique, Comcable ou K-Net proposent leur offre d’accès au réseau FTTH.
Cette situation touche déjà 9 000 foyers de l’agglomération Nancéienne. Du côté de Saint-Quentin, Senart, sur le RIP d’Europ’Essonne et dans le département de l’Ain et d’autres zones sont également concernées par le phénomène.
Univers Freebox a contacté l’AVICCA, l’Association des Villes et Collectivités pour les Communications Electroniques, une association regroupant, les villes, collectivités, communautés de communes, départements et régions et défend les intérêts des collectivités et l’intérêt du public local, notamment en matière de déploiement du très haut débit.
Ces collectivités, lorsqu’un opérateur ne s’est pas positionné sur le déploiement du FTTH dans un zone peuvent monter un RIP, Réseau d’Initiative Publique, obtenir des financements publics avant de passer par un sous-traitant. Ces RIP sont ensuite accessibles à tous les FAI, mais peu proposent déjà leurs offres sur ces réseaux d’initiatives publiques.
Pour Patrick Vuitton, délégué général de l’AVICCA, " ce n’est pas une découverte". Il nous livre son analyse sur ce sujet :
"Il y a deux choses différentes :
1) Est-ce que le réseau serait incapable d’accueillir un opérateur ? ce n’est pas mon avis en première analyse. Par exemple à Pau, quand Orange a voulu venir dessus, il y a eu des travaux d’adaptation du réseau. Si un opérateur a envie de venir sur un réseau, un RIP ou un autre, et s’il y a des demandes techniques raisonnables, il peut tout à fait le faire et ça s’est déjà fait.
2) Est-ce que les opérateurs ont envie de venir sur ces réseaux ? On comprend particulièrement qu’Orange qui possède une boucle locale ne soit pas pressé pour le faire. Free a fait une réponse très claire, à notre dernier colloque qui était qu’en l’État actuel, il ne viendrait sur aucun Réseau d’Initiative Publique.
Pour Patrick Vuitton, exclure les gros opérateurs des RIP n’est clairement pas le souhait des collectivités, mais on ne peut obliger aucun opérateur à être présent. On n’a pas de force de coercition, on ne peut que jouer le jeu de la concurrence. Aujourd’hui la seule manière de faire venir ces opérateurs sur les RIP, c’est de faire venir < ces petits opérateurs> qui prennent des parts de marché et qui font venir les autres par le jeu de la concurrence."
Pourquoi n’y a t-il pas d’homogénéité d’infrastructures lors du déploiement des RIP ?
"Il peut y avoir des questions d’adaptation. Il y a des travaux en cours sur cette adaptation. Aujourd’hui i l n’y a pas de cahier des charges. Il y a trois ans quand on a démarré toutes ces questions, on a demandé à ces grands opérateurs de publier un cahier des charges, et on pourrait partiellement s’y conformer, ils n’ont pas voulu le faire en disant "c’est notre savoir faire, on veut pas le publier". Après ils disent, "on ne veut pas venir chez vous ce n’est pas conforme", donc c’est un peu compliqué."
"Ce sont des prétextes qui cachent des intérêts économiques qui sont forts. Aujourd’hui, il y a trois opérateurs qui ont 90 % du marché du haut débit (NDLR Free, SFR et Orange), c’est un marché très rentable et qui à très peu de mouvements de ses abonnés. Le très haut débit perturbe un peu ce marché, ce n’est qu’un peu de temps pour que la situation se débloque."
Quelles sont les conditions financières pour un opérateur lorsqu’il arrive sur un RIP ?
"Les conditions financières d’accès au réseau peuvent être différentes, mais les règles sont les mêmes. L’ARCEP a établi des règles d’accès aux réseaux FTTH qui s’imposent à tous les réseaux. Après, ça ne va pas jusqu’à imposer le même tarif partout. Après ces réseaux représentent quelques milliers de prises, ça n’a pas d’intérêt stratégique pour les opérateurs nationaux. L’effort qu’il faut faire pour s’adapter, souvent ça ne les intéresse pas tout simplement."
Quelles sont les solutions ?
"Il y a des discussions qui sont en cours avec l’ARCEP et la mission Très Haut Débit, il y a à la fois des travaux d’homogénéisation au niveau national. L’ARCEP impose de plus en plus de choses. Elle va imposer une manière de comptabiliser et répercuter le coût de ces réseaux aux utilisateurs, les textes n’existent pas aujourd’hui et les réunions ont lieu tous les deux mois. Ce que j’ai compris, c’est qu’il y avait des discussions, mais qui prenaient énormément de temps, il faut deux mois entre chaque rendez-vous, les FAI ne sont pas pressés."
Que peuvent faire les abonnés pour avoir accès aux réseaux avec leur opérateur ?
"Ce sont des relations commerciales entre l’opérateur du RIP et le fournisseur d’accès à internet. La seule manière qu’ont les abonnés de faire pression, c’est de partir et de dire "j’aime bien Free, SFR… Mais si vous ne pouvez pas me proposer le très haut débit parce que vous ne voulez pas venir sur ce réseau, je vais aller chez un autre opérateur." Il faut peut-être qu’il y en ait un certain nombre qui fasse cela pour débloquer la situation."